dimanche 27 octobre 2002

1999 (1982)

Dans notre série "Chroniquons un album de Prince 20 ans après sa sortie", voici venu le temps de...



1999 (1982)


1999
Little Red Corvette
Delirious
Let's pretend we're Married
D.M.S.R.
A-U-T-O-matic
Something in the Water (does not compute)
Free
Lady Cab Driver
All the Critics loves U in New York
International Lover


MPLS Funk.
Si les quatre albums précédents peuvent être considérés comme l'affirmation, étape par étape, du personnage Prince, "1999" est celui de la confirmation de son statut de Star aux USA. C'est avec cet album qu'il va s'imposer définitivement sur son sol natal, notamment grâce à la sympathique Ballade Rock "Little Red Corvette".
Un clip fleur bleue et une diffusion régulière sur la toute nouvelle chaîne nommée MTV, et voila l'ex-paria des médias, occulté pour cause d’obscénités répétées, devenu acceptable pour le grand public. Il faut dire que l'année 1982 est aussi celle de la consécration pour un autre artiste noir américain, Michael Jackson et son époustouflant "Thriller", dont le succès planétaire justifié éclipse quelque peu celui, plus modeste, du Kid de Minneapolis.

Prince tient son premier "gros" Hit en édulcorant sa formule magique, cependant le reste de l'album fait moins de concessions. Passé maître dans l'art de la programmation des "drum-lines", l'artiste nous livre son plus impressionnant titre Funk jusqu'alors. Avec sa célèbre rythmique électro imbriquée dans un gimmick accrocheur, l'imparable "1999" ouvre le bal façon "dance" dense d'apocalypse ("don't worry I won't hurt U, I only want U to have some fun"). On y décèle aussi, rétrospectivement, l'embryon du futur Hit de l'album suivant, "Let's go crazy".

Il conserve son coté bravache avec l'excellent "Let's pretend we're married", une composition Funk-Rock semblant échappée d'un ancien album où il est question, comme d'hab, de tester ses talents à l'horizontale jusqu'à plus soif, quitte à dérailler complètement sur la fin ("I wanna fuck U so bad it hurts, it hurts, it hurts / I sincerely wanna fuck the taste out of your mouth"). Ou encore "D.M.S.R", hymne aux beautiful people qui hantent les dancefloors, à la rythmique lourde et au refrain scandé comme un slogan ("Dance, Music, Sex, Romance !", voila enfin un véritable projet politique ; -). 

Le reste des chansons prend un tour nettement électro, notamment les excellents "AUTOmatic" et "Something in the water (does not compute)". La tonalité inquiétante et les paroles zarbis donne une ambiance inédite, entraperçue précédemment avec le titre "Annie Christian", qui tranche résolument avec le style jusqu'alors romantique ou festif de Prince. L'amour obsessionnel décrit dans "AUTOmatic" montre le coté angoissant d'une passion exclusive ("No1 else could understand U, you're 2 complex, They say nothing's perfect, but they don't know U"). Le titre se termine sur un choeur de femmes en pleurs, après cette sentence implacable "I can hear U, I'm going 2 have 2 torture U now". Bonjour la flippe. Idem concernant "Something in the water", Prince passe en mode parano lorsqu'il ne parvient pas à satisfaire sa bien-aimée ("Must be something in the water U drink 'cuz why else would a woman wanna treat a man so bad?"). 
Les deux titres Rock de l'album, "Lady Cab Driver" et "All the Critics love U in New York", nerveux et efficaces, sont eux aussi décalés par rapport à ce que proposait l'artiste naguère. Prince réussi à mêler une sorte de mystique poétique avec un second degré libérateur dans l'écriture de ses textes, et reste incroyablement inspiré mélodiquement, partant dans des solos guitaristiques bien démonstratifs de ses capacités. Dans le premier il tente de se libérer de lui-même, s'évader de la solitude à l'aide d'une chauffeuse de taxi ("Lady, I'm so lonely, I know that's not the way 2 be, Don't want isolation, but the air it makes me cold, Drive it, baby, drive it, drive this demon out of me"). L'escapade escalade jusqu'au climax lors duquel notre Prince règle ses problèmes en prenant la jeune femme à la hussarde, probablement sur la banquette arrière de son taxi. Bah oui, on ne se refait pas. Le garçon continue à régler ses comptes dans "All the critics", cette fois avec l'hypocrisie du milieu artistique dans lequel il évolue depuis maintenant quelques années ("U don't have 2 keep the beat, they'll still think it's neat - in New York"). 

1999 est le premier double-album de Prince. Cela est en partie du à la durée des titres, qui pour la plupart dépassent allègrement les cinq minutes. S'il reste quelques vestiges de la première époque Princière avec des chansons Pop anecdotiques comme "Delirious" et les slows un peu datés "International Lover" ou "Free", la matière principale de cette production est neuve, et peut être vue comme le pont hybride entre la période Funk-Disco "Dirty Mind" et le choc Rock "Purple Rain". 
Avec ses longues plages instrumentales inventives, ses sonorités nouvelles, ses textes plus aériens, cette production permet à Prince de prendre une envergure qui préfigure ses futurs chefs d'oeuvre.

samedi 19 octobre 2002

Le Pacte des Loups

(2001 - Réalisé par C. Gans) *** Edition Collector (3 Disques)

En France au 18e siècle, le Roi est préoccupé par les évènements qu'on lui rapporte de la province du Gévaudan : une bête qu'on dit monstrueuse s'attaque aux femmes et aux enfants. Le chevalier de Fronsac est chargé d'enquêter sur ce mystère.

Un mélange des genres casse-gueule qui donne un film à l'histoire bancale (un complot mystique avec une profusion de personnages aux motivations manichéennes). De nombreuses scènes sont merveilleusement filmées, mais le choix de mixer faits historiques et délires improbables (un indien qui se bat comme un asiatique dans l'aristocratie française du 18e ?!) fait que j'ai tendance à ne plus prendre aucun des personnages au sérieux. Certains acteurs sont d'ailleurs vraiment trop décalés dans le contexte, Vincent Cassel notamment, dont le jeu et le phrasé me semble plus adapté à des persos contemporains qu'à un aristo.
On prend quand même un pied immense devant ces décors naturels magnifiques, prétextes à une mise en scène grandiloquente, même parfois un peu trop "vidéo clip" dans l'abus de ralentis. Dommage aussi que la "bête", sujet principal de l'aventure, s'intègre mal lors des plans larges (ça sent trop l'image de synthèse). Le style cinématographique très puissant visuellement et cette volonté de faire du grand spectacle façon Hollywood en gardant un contexte frenchy sont à mettre au crédit du réalisateur, qui réussit complètement son pari sur la forme mais beaucoup moins sur le fond.

vendredi 18 octobre 2002

Funny Games

(1997 - Réalisé par M. Haneke) **

Une famille autrichienne se rend dans sa maison de vacances en bord de mer pour profiter des beaux jours. Pendant que le père et le fils partent préparer le voilier, Anna, la mère, s'affaire dans la cuisine. Elle reçoit bientôt la visite d'un jeune homme se présentant comme un ami des voisins.

Une histoire brutale de serial killers, une dénonciation froide de notre rapport aux images et à la violence. Le traitement est atypique, le réalisateur s'amuse des clichés les plus rabâchés dans les médias et sort même complètement de son récit dans la fameuse scène de la télécommande, très surprenante. Une lente escalade de violence, psychologique et physique. Les jeunes tueurs sont propres sur eux et polis, sans état d'âme et sans folie, sans mobile apparent. L'un d'eux s'adresse à plusieurs reprises directement au spectateur, qui devient donc complice. Mais dans cette volonté de nous impliquer, nous voyeurs, l'auteur met aussi une distance face aux images. On est jamais "dans" le film.
Au final je ne me suis pas senti témoin, ni n'ai eu quelconque émotion malgré les acteurs excellents (le père et la mère). Ils subissent le jeu malsain de leurs tortionnaires avec une grande conviction, complètement à l'opposé du détachement goguenard des bourreaux. Malheureusement l'intrigue est sans véritable conclusion. On pourra m'objecter que c'est justement le message du film, je reste tout de même perplexe face à cette froide leçon du "professeur" Haneke.

jeudi 17 octobre 2002

Les Tontons Flingueurs

(1963 - Réalisé par G. Lautner) *****

Un ex-truand rangé des voitures doit se rendre au chevet d'une vieille connaissance, surnommé "Le Mexicain". Ce dernier, avant de mourir, va lui confier ses affaires illégales, ainsi que la surveillance de son unique fille, une jeune femme ignorant tout des activités de son père.

Quand on passe tous les codes du film de gangsters 60's français à la moulinette Audiard, cela donne le chef d'œuvre que l'on sait. Évidemment ses dialogues succulents ne seraient rien sans leurs interprètes. La mise en bouche est faite par MÔSSIEUR Lino Ventura en classieux gangster reconverti, accompagné de Bernard Blier parfait en faux caïd, Jean Lefebvre dans son éternel rôle de faux-cul, Claude Rich dont le style précieux sied à merveille à son personnage et Francis Blanche en avocat véreux, face à une pléiade de seconds rôles majestueux : Robert "Yes SIR!" Dalban, Horst "Fritz" Franck, Dominique "Madame Mado" Davray, etc. Le sérieux des situations est toujours désamorcé par une astuce scénaristique ou un bon mot, un régal. Avec en prime ce coté vieille France d'après guerre, où les malfrats avaient une certaine classe et savaient causer.

mercredi 2 octobre 2002

Fawlty Towers - The Complete Collection

(TV : 1975-1979) **** All 12 classic episodes (3 DVD)

Les mésaventures de Basil Fawlty, propriétaire avec son épouse de l'hôtel "Fawlty Towers". Un personnel calamiteux, des clients bizarres et surtout, surtout, un Basil incompétent et incontrôlable.

Ayant déjà quitté le "Flying Circus" lors de la dernière saison en 1974, John Cleese se lança rapidement dans une nouvelle série sur les ondes de la BBC l'année suivante, avec pour complice sa femme Connie Booth. L'idée de départ est géniale pour une sitcom, la vie d'un petit hôtel assez miteux dont le proprio tente en vain de renouveler la clientèle. Les premiers épisodes démarrent gentiment, mais rapidement la folie du grand John, aidé par une pléiade d'excellents acteurs, fait décoller "Fawlty Towers". La recette est invariablement la même, Basil tentant de masquer son incompétence vis à vis de sa femme et des clients. Les situations comiques sont légions, souvent à base de quiproquos, soutenues par des dialogues succulents (vu le débit verbal des orateurs, je dois avouer que certaines saillies passent inaperçues au premier visionnage).
Evidemment John Cleese joue à fond sur son personnage irascible qui martyrise son personnel (pauvre Manuel !) et subit sa femme, il rappelle un peu notre De Funès national dans sa mauvaise foi permanente et ses pétages de plomb imprévisibles. Moins révolutionnaire que les incontournables Monty Python, "Fawlty Tower" reste un indispensable pour les fans de John Cleese, d'humour anglais en général et des Dieux Pythonesques en particulier.