samedi 21 octobre 2006

VALKYRIE PROFILE 2 - SILMERIA

Fun 8/10
Technique 8/10
Style RPG Mythologie Nordique
Editeur / Langue Square Enix-Tri Ace / Import USA
Infos 1 DVD / 1-2 Players / Memory Card 67 Kb / Digital & Analog Control / Vibration Function



De profil, en pleine face.

Pas facile de se distinguer pour un RPG PS2 dans le véritable tsunami qui a déferlé sur cette console en 2006, après des années de vaches maigres. On ne s'en plaindra pas, à vrai dire on en redemande quand surgit en version USA la suite d'un des jeux les plus côtés de la vieille PlayStation 1. Valkyrie Profile, outre son nom à coucher dehors, c'est avant tout un caractère bien trempé avec des choix artistiques forts, avec ce savoir-faire du célèbre studio Tri-ace. Cela donne à la série une identité visuelle propre et des systèmes de jeux très originaux, qui, d'entrée, pourront conquérir ou dégoûter l'Amateur de RPG.
S'ouvrant sur une cinématique en images de synthèse ultra léchée, Square oblige, soutenue par une symphonie discrète, "Valkyrie Profile 2 - Silmeria" s'impose d'emblée comme la digne suite de son aîné. On replonge avec plaisir dans cette mythologie nordique sauce nippone. Toutes les bases du Jeu de Rôle japonais sont là, chaque personnage étant déterminé suivant quelques caractéristiques et compétences, et devant bien sûr s'équiper en vue des challenges qui l'attendent.

Premier choc, la représentation graphique particulière de VP : un décor 3D magnifique, vivant et bien détaillé, aux couleurs douces, mais dans lequel on évolue simplement sur un fil, dans une vue fixe de profil. La caméra suit latéralement tous vos mouvements. Cela donne des environnements riches, fourmillants d'animations, mais que le joueur ne pourra jamais explorer à loisir. D'où une certaine frustration pour les fanatiques d'exploration, mais pour celles et ceux cherchant un brin d'originalité, une sensation de fraicheur bienvenue. Classiquement on peut discuter avec les habitants, entrer dans les échoppes, les auberges et les bâtisses. L'angle de vue à la 3e personne permet de s'approcher au plus près des protagonistes, offrant un luxe de détails, dans les costumes en particulier.
Valkyrie Profile 2 privilégie les phases "Arcade" lors des déplacements dans les donjons, avec des interactions inhabituelles vis à vis des ennemis se balladant dans chaque lieu : on peut utiliser son rayon "photon" pour paralyser temporairement un adversaire dans un genre de bloc de crystal, évitant non seulement le combat mais utilisant le monstre "gelé" comme marche-pied et sauter dessus pour atteindre des plateformes autrement inaccessibles. Mieux encore, on peut se téléporter instantanément à la place de la cible en envoyant une seconde salve de photon, franchissant du même coup des obstacles, lourdes grilles ou larges gouffres. A vous les coffres, parfois piégés, emplis de trésors majestueux ! (enfin, du fric et de l'équipement surtout). La plupart du temps vous devrez également actionner des méchanismes simples (leviers, éléments de décors à déplacer ou à détruire) pour libérer la sortie. Voyons à présent plus en détail le moment que vous attendez toutes et tous, la gestion des combats.

Open-Baston.

Tranchant résolument avec la présentation figée lors de l'exploration des villages, le mode "combat" dans les donjons est, lui, réalisé entièrement en 3D et donne un contrôle total et dynamique au joueur. On bascule dans cet écran dès qu'on entre en contact avec un monstre, comme c'est la tradition depuis des millénaires dans les RPG japonais. On se retrouve alors dans un environnement vaste, une grande zone de baston faite de dénivellés, de passages étroits et de cul-de-sac. VP2 propose pas mal d'innovations, ou plutôt des améliorations de concepts déjà existants, qui rendent les affrontements passionants. Heureusement d'ailleurs, parce que des combats, vous allez en bouffer !
Vous dirigez un groupe de quatre héro(ïne)s, chacun attribué à un bouton du pad. Pour attaquer, rien de plus simple, il suffit d'appuyer sur le bouton correspondant au perso. Suivant l'arme employée et les compétences apprises, chacun d'eux enchaînera les bourre-pifs sur la cible désignée. Le joueur doit gérer deux critères essentiels : les points de vie de ses persos, évidemment, et les points d'action (AP) du groupe. Lorsque vous effectuez une action, attaque, lancement d'un sort magique (pas de points de magie dans VP2), utilisation d'une compétence ou d'un objet, vos points d'action décroissent. Tout se passe en temps réel : dès que vous vous déplacez dans le décor, les ennemis en font de même, et vous regonflez votre jauge d'Action.
Les zones d'attaques des combattants sont visibles, toute l'astuce des combats consiste à placer ses persos à portée de coups tout en évitant de se trouver dans l'aire d'attaque des monstres. Pour cela vos Héros peuvent effectuer des accélérations ("Dashing" avec le bouton R1). Ce mouvement est indispensable pour s'approcher sans risque des adversaires, ou s'éloigner d'un bond pour refaire son stock de points d'action. Le joueur peut aussi scinder son groupe en deux pour faire des diversions.

Il existe plusieurs archétypes de personnages, de l'épéiste à l'archer, en passant par le sorcier. Chacun met un temps plus ou moins long pour armer son geste, le joueur doit activer les attaques dans un ordre précis pour voir l'ensemble des coups arriver au même instant sur la cible, gagnant des bonus en dégâts et remplissant la jauge de "Soul Crush". Une fois cette dernière au maximum, les persos possèdant une arme le permettant peuvent alors enchaîner des coups spéciaux dévastateurs et spectaculaires. Autre intérêt de la chose, en brisant des pièces d'équipements d'une cible on récupère des objets et on peut également activer le "Break Mode". Ce système permet d'avoir des Points d'Action infinis pendant une courte durée, permettant de bourriner frénétiquement les attaques sur une pauvre victime.
Dernière nouveauté, et non des moindres, le concept du "Leader" dans le groupe adverse. Il s'agit d'un ennemi particulier, clairement identifié dans chaque affrontement. Une fois le Leader éliminé le combat s'arrête, quelquesoit le nombre de monstres encore vivants. On ramasse au passage divers bonus en items et des gemmes de cristaux magiques qui multiplient de manière exponentielle les points d'expérience gagnés en fin de baston. Ces cristaux servent aussi de monnaie d'échange pour acquérir des objets spéciaux, les "Sealstones", pierres mystiques donnant de gros avantages en combat.

Esprits, êtes-vous là ?

Les Sealstones se découvrent et s'activent uniquement dans les donjons. Ces pierres magiques augmentent par exemple les dégâts physiques ou élémentaires (feu, glace, etc), d'autres améliorent les soins ou le fric gagné en fin de bataille. Toutes les Sealstones ne sont pas bénéfiques, certaines contiennent des malus. Il faudra alors que votre groupe les transportent jusqu'à des endroits spécifiques dans les donjons, des autels nommés "Daïs", pour que ces pierres maudites diffusent leurs handicaps aux ennemis (caractéristiques diminuées par exemple). Avec suffisament de Gemmes vous pourrez acheter les Sealstones pour les retrouver dans tous les donjons. Toute une stratégie à mettre en place avant de rencontrer les Boss, d'autant plus que dans certaines parties des donjons tous les effets sont inhibés (y compris le rayon photonique et les Sealstones).

Valkyrie Profile 2 conserve une des meilleures idées du premier épisode, la présence des "Einherjar", ces esprits de Héros défuns. Tombés sur le champ de bataille en honneur aux Dieux, le sympathique Odin et toute sa clique de bras cassés, les Héros ne connaissent pas le repos éternel, malheureusement pour eux. Ils sont incarnés dans des objets leur ayant appartenus, la plupart du temps leur arme, traînant au fin fond des donjons humides. Vous aurez la possibilité de les "réveiller" lorsque vous tomberez sur ces artefacts, et de les recruter dans votre équipe. Une fois quelques niveaux d'expérience engrangés, vous pourrez les libérer pour qu'ils rejoignent (enfin) les cieux, et vous empocherez au passage des cadeaux-bonus de la part des Grand(e)s Patron(ne)s Célestes.
La gestion de l'équipement est prépondérante dans le jeu. Il existe neuf emplacements par persos, et c'est par l'intermédiaire des armes, armures et accessoires que vos personnages pourront acquérir la majorité de leurs compétences (l'autre partie étant obtenue automatiquement à chaque montée de niveau, suivant la classe du héros). Suivant son type un objet augmente des attributs (attaque, défense, intelligence...) et propose divers bonus (nombre d'attaques, pourcentage de protection contre des dégâts élémentaires ou les changements de status -poison, paralysie, etc-).
Les pièces d'équipements portent parfois des runes colorées (rouges, bleues ou vertes). Il en existe une vingtaine différentes et c'est en les combinant que vos Héros apprendront leurs compétences : regain automatique de vie, meilleure esquive ou résistance, dégâts augmentés contre certains types d'ennemis, etc. Y'a du boulot !

La colère d'Odin

Coté scénario, Valkyrie Profile 2 nous conte l'histoire d'Alicia, jeune Princesse du royaume médiéval de Dipan. Outre tous les problèmes habituels des jeunes filles de son époque (hérédité pesante et manque de perspectives d'avenir, songez que les tampons "Nana" n'ont même pas encore été inventés !), la Princesse souffre d'un syndrome bien singulier : son esprit est habité par une Déesse. Et pas n'importe laquelle, puisqu'il s'agit d'une des trois Valkyries, Silmeria. Pire, cette Divinité ne se gène pas pour prendre le contrôle du corps qu'elle habite (insérez ici votre jeu de mot salace), car Silmeria a mis Odin en pétard à la suite d'une sombre histoire de défiance et de traîtrise. Faut dire que les Dieux sont très souvent mesquins et tatillons.
Bref, notre Alicia/Silmeria erre dans la contrée, parlant toute seule, à la recherche de réponses aux questions qu'elle ne connaît pas, elle est mûre pour une émission de Jean-luc Delarue. Rapidement autour d'elle(s) va se constituer une troupe d'élite : un archer désoeuvré nommé Rufus, Lezard, un mystérieux Sorcier, Leone et Arngrim, des mercenaires aux motivations obscures. Plus une palanquée d'esprits réveillés par Silmeria. Tout ce petit monde révélera ses secrets au cours de l'aventure.

En explorant les petits villages alentours et en discutant avec les autochtones, on ne tarde pas à en savoir plus sur les événements qui secouent le royaume et les motivations des personnages. Chaque lieu apparaît en fonction de vos trouvailles sur la magnifique carte du monde, il ne faudra d'ailleurs pas hésiter à revenir visiter certains endroits pour découvrir de nouveaux lieux. Mieux, il est fortement recommandé de fréquenter régulièrement les échoppes locales pour y revendre tout le matos accumulé lors des descentes en donjons, puisque les marchands pourront, grâce à tout votre fourbi, fabriquer des armes et armures inédites et bourrées de bonus incroyables.
VP2:Silmeria est doté d'une solide durée de vie, probablement plus de 60 heures, mais n'évite pas quelques écueils. L'histoire reste très classique, univers médiéval oblige, et on n'évite pas une certaine routine (village-donjon-boss, village-donjon-boss...). Même si les voix anglaises passent bien, la synchronisation du doublage est complètement loupée : on entend souvent des personnages parler sans que leurs lèvres bougent. Cela donne parfois un effet comique pas forcément recherché par les auteurs ;-) En combat des personnages se trouvent parfois temporairement bloqué dans le décor, ruinant vos plus fines tactiques d'approche. La pilule la plus difficile à avaler provient des attaques kamikazes de certains adversaires, menant à un "Game Over" direct sans qu'on puisse réagir. Frustrant, mais heureusement rare.
Les batailles sont ultra-dynamiques et requiert une bonne dose d'astuce de la part du joueur (placement, gestion des AP et de l'équipement). C'est assurément l'un des points forts du jeu, l'autre concernant la partie visuelle. Sur le plan graphique et sonore le jeu en impose avec un niveau de détails poussé et une musique omniprésente sans être lourde. Ce Valkyrie 2 est donc dans le peloton de tête dans la riche production RPG de cette année, sachant qu'il manque encore quelques solides prétendants dans la liste (FF12, Rogue galaxy).

mercredi 4 octobre 2006

Joël Séria - Coffret (2006)

Coffret : Joël Séria (2006) : Mais ne nous délivrez pas du mal (1971) *** + Charlie et ses deux nénettes (1973) * + Les galettes de Pont-Aven (1975) **** + ...Comme la lune (1977) ****
3 DVD

- Mais ne nous délivrez pas du mal : Deux adolescentes, amies et filles de bonne famille, passent leurs semaines au pensionnat catholique. Elles y découvrent la littérature interdite et l'hypocrisie de la morale religieuse.
- Charlie et ses deux nénettes : Charlie, la quarantaine, rencontre deux jeunes filles au sortir de l'ANPE. Aucun d'entre eux n'a trouvé d'emploi stable. Ils ont l'idée de faire une tournée des marchés.
- Les galettes de Pont-Aven : Henri Serin est un homme à la dérive. Son boulot de représentant en parapluies l'emmerde gentiment, sa famille le gonfle lourdement. Il sent qu'il est passé à coté de sa véritable vocation, la peinture. Pour tromper l'ennui il couche avec une cliente. Un enchaînement de déconvenues va mener Serin vers le village de Pont-Aven.
- ...Comme la lune : Monsieur Pouplard a quitté femme et enfant pour vivre une idylle torride avec une bouchère sexy. Comme il est un peu con, Pouplard a l'idée saugrenue de réunir son ex et son amante chez ses parents, espérant stabiliser une situation scabreuse.

Pour son premier long métrage Joël Séria frappe fort. Après avoir été projeté au festival de Cannes, "Mais ne nous délivrez pas du mal" se retrouve interdit de diffusion pendant huit mois. La preuve que même après Mai 68, les mentalités étaient encore bien rigides dans notre pays de Liberté. 35 années plus tard le film n'a évidemment plus la même force, mais cette histoire d'ados bourgeoises aux âmes-sœur, se dévouant au Mal, reste hyper moderne. En tapant là où ça fait mal (la Religion, la Mort, le Sexe), les deux héroïnes remettent en cause l'ordre moral établi. Le film ne joue pas sur l'horreur graphique ou le voyeurisme pervert, pas de scènes gores ou érotiques, mais en montre suffisament pour que l'on comprenne ce qui lie les deux filles, le mal-être diffus face à une destinée déjà écrite, l'envie de transgresser, le besoin d'exister ailleurs que dans le carcan d'une époque. La dernière scène, lyrique et terrible, rattrape largement les quelques fautes de rythme qui parcours cette odyssée vers le néant.
On est du coup très surpris et un peu déçu par le second film, "Charlie et ses 2 nénettes", qui propose une chronique de ses années post-68. Un bourlingueur quarantenaire qui entraîne deux jeunesses sur les marchés, ça aurait pu donner un portrait de la France "vraie". Mais il manque la truculence d'un Jean-pierre Marielle (il ne joue içi qu'un rôle mineur) et plus d'envergure pour les deux gonzesses qui se contente de ricaner pendant la moitié du film. Dommage.
La rencontre Séria-Marielle donnera quelques temps plus tard deux fleurons dans lesquels le sidérant acteur joue la pleine mesure de son talent. "Les galettes de Pont-Aven" et "… Comme la lune" se hissent au rang de films cultes pour celles et ceux qui savent apprécier le grand numéro délivré par Môssieur Marielle. Il ne dépeint pas un simple con, ni même un beauf ordinaire, non, c'est un Seigneur qui élève sa connerie au rang d'Art majeur, et aussi un adulte perdu dans ses rêves d'ado jamais réalisés.
Alors que dans ses deux films précédents Joël Séria s'attachait aux caractères féminins, içi il s'attaque à la caricature de l'Homme de l'Héxagone, un macho mi-mufle mi-poète, étouffé par des femmes tantôt nymphos, tantôt soumises, dociles ou sournoises, bref, un cauchemar post-MLF à prendre au second (voire 3e) degré. Marielle enchaîne les bons mots, avec une joyeuseté communicative d'imbécile heureux, part dans des délires improbables lorsqu'il tombe en extase ou en déprime, déclame tout et son contraire avec un sens inné de la formule qui déchire et un jeu d'acteur largement au dessus de la moyenne. On ne se lasse pas de ses tirades sur le cul de ses muses dans "'Les Galettes", ou de ses envies 100% Mâle de sa bouchère d'amante, fièvreusement déclamées dans "Comme la lune" ("T'es vachement bien bidochée, j'vais t'fourrer !!"). La Classe Internationale ;-) Et puis, derrière la drôlerie et la truculence, un vrai message se dégage finalement concernant l'homo-sapiens Gaulois.