samedi 13 octobre 2012

Love Symbol (1992)

Dans notre série "Chroniquons un album de Prince 20 ans après sa sortie", voici venu le temps de...




"Love Symbol" (1992)


 My Name is Prince
Sexy M.F.
Love 2 the 9's
The Morning Papers
The Max
Blue Light
I Wanna Melt with U
Sweet Baby
The Continental
Damn U
Arrogance
The Flow
7
And God created Woman
3 Chains o' Gold
The Sacrifice of Victor




Les années commerciales.
Entendons-nous bien. "Love Symbol" (ou O(+> , mixage des symboles mâle/femelle) est un album de businessman, un assemblage de titres créés pour "marcher", selon une formule de roublard bien connue de Prince. Tout cela a fonctionné à merveille avec "Batman" et "Diamonds and Pearls", la tentation de continuer sur la lancée est forte, d'autant plus qu'un contrat mirobolant avec sa maison de disques pousse l'artiste et son groupe New Power Generation à la surenchère.
Et surenchère il y a. Conçu initialement comme une saga au vague parfum d’Égypte antique, "Symbol" devait prendre la forme d'un concept-album Opéra-Rock, avec des airs de "Phantom of Paradise" façon Brian De Palma. Rappelons que dans ce film de 1974, un compositeur défiguré, dissimulé sous un masque, vendait son âme au Diable pour faire chanter sa muse, la frêle Phoenix. 
On trouve des vestiges de ce délire dans les interludes entre les chansons, où une journaliste tente d'interviewer la Star à la voix déformée. L'homme se fait passer pour un certain Victor et écrit un opéra pour sa nouvelle conquête, une princesse du Caire (qui n'est autre que Mayte, jeune danseuse des N.P.G. et future première femme de Prince). 

Symbol se veut une démonstration de savoir-faire de l'artiste avec une collection de titres dans tous les styles en vogue de l'époque. Le résultat est une confirmation que Prince n'est pas à son affaire avec le Reggae (le gentillet "Blue Light"), la Dance Technoïde (le raté "I wanna melt with U") ou la ballade Jacksonienne (le terrifiant "Sweet Baby"). 
Non, le Funkster n'est décidément pas fait pour l'imitation. 

Tout juste parvient-il à produire des parodies réussies. Dans "My name is Prince" il reprend le style et les tics vocaux de son vieux concurrent, Michael Jackson l'auto-proclamé King of Pop, pour mieux le basher ("My name is Prince, I don't wanna be King, Cuz I've seen the top and it's just a dream"). Dans "3 Chains o' Gold" c'est au Rock grandiloquent de Queen période "Bohemian rhapsody" qu'il s'attaque, avec ses parties chantées comme dans les comédies musicales. Encore et toujours une histoire de rupture amoureuse, poussée à l'extrème également dans le texte ("So evil girl if one of us has a date with the undertaker, which one will it be? / If one of us has 2 go, you will go before me") 
Vue au second degré, la farce fonctionne.

C'est lorsqu'il s’attelle à son pêché mignon que Prince redevient captivant. On se réjouit d'un "Sexy MF", R and B classieux, punchy et bravache, ou "7", envolée mystique semblant échappée de l'album "Lovesexy". D'un coté on retrouve des lyrics délicieusement tendancieuses ("I get hard if the wind blows your cologne near me"), de l'autre le prêche habituel à la vie meilleure qui nous attend une fois mort ("There will be a new city with streets of gold, The young so educated they never grow old"). 
On savoure aussi les ballades, sur "Symbol" l'artiste atteint le point culminant de sa science du groove romantique avec "Love 2 the 9's", "Damn U" ou "And God created Woman". Garanties sans excès de guimauve, l'éloignant de la sobriété des premières compositions qui étaient principalement des thèmes au piano, ces titres courts finement charpentés alternent joliment avec le gros son Pop-Rock qui réveille le reste de l'album. Ainsi, malgré la présence de la voix "rappeuse" de Tony M, les solides "The Max", "Arrogance / The Flow" et "The sacrifice of Victor" assurent le show, même si on est loin des prises de risques et de la fantaisie singulière de la décennie précédente. Ce dernier titre contient d'ailleurs quelques confessions surprenantes -car rares- sur la possible enfance de Prince, où il est question d'une naissance difficile et d'épilepsie jusqu'à l'age de 7 ans ("I was born on a blood stained table, Cord wrapped around my neck, Epilectic 'til the age of 7, I was sure heaven marked the deck"). Il y raconte aussi la fin de la ségrégation raciale qu'il vécut en 1967 ("1967 in a bus marked public schools, Rode me and a group of unsuspecting political tools"). 

Album conventionnel soufflant l'excellent et le médiocre, "Love Symbol" est sauvé par la qualité de sa production. Moins tape-à-l'oeil que le précédent, "Diamonds and Pearls", il résiste bien mieux au passage du temps et reste le meilleur exemple du "son" Prince du début des 90's.