vendredi 26 juin 2009

Buffet froid


(1979 - Réalisé par B. Blier) *****

Alphonse Tram devise avec un inconnu dans une gare RER déserte. Plus tard il retrouve l'homme agonisant, poignardé avec le propre couteau qu'Alphonse avait négligemment perdu. Paniqué il rentre chez lui dans une grande tour vide, retrouver sa femme. Bientôt quelqu'un vient sonner à la porte, l'inspecteur Morvandieu.

Quand Bertrand Blier est en forme et que ses acteurs le sont aussi, cela donne l'un des films les plus impalpables du cinéma Français. Situations imprévisibles, dialogues surréalistes, toute la marque de fabrique ironique du fiston Blier, épaulé par le trio de Monstres Papa-Depardieu-Carmet, mis au service d'une démonstration obscure qui tient le spectateur en éveil, le fait marrer doucement ou le choque gentiment. Les décors austères de la vie moderne, grands ensembles écrasants et banlieues pavillonnaires désertes, ou forêt majestueuse et lacs immenses endormis, sont peut-être les personnages principaux du film, tandis que gesticulent et babillent les pauvres hères, courant tous vers notre destin commun : une belle jeune femme qui s'appelle la Mort. Autant en rire.

samedi 20 juin 2009

Dobermann


(1997 - Réalisé par J. Kounen) *** Edition 2 DVD

Le charismatique voleur Yann Le Pentrec, alias Le Dobermann, écume les Banques. Accompagné de sa moitié sourde-muette et de son gang de doux dingues il nargue la police. Cristini, un flic aux méthodes hors-la-loi, va tout faire pour le coincer.

Un film si unanimement vomit par la Critique Française ne peut être réellement mauvais. Le cas "Dobermann" est d'école, puisqu'on y voit un cinéaste parodier les plus nauséabonds action-movies d'Hollywood tout en se référençant au cinoche 60's eud'chez nous, dans une bonne humeur communicative et une volonté affirmée de "choquer le bourgeois". Et ça marche ! Les personnages sont délicieusement unidimensionnels, les dialogues sonnent merveilleusement faux, les plans de caméra sont inutilement branchouilles, les situations toutes plus débiles les unes que les autres, et la morale pernicieusement attendue. Que demander de plus à un film tout en second degré ?

Un jour sans fin


(Groundhog day - 1993 - Réalisé par H. Ramis) *****

Comme chaque année en février l'égocentrique et cynique Phil Connors, présentateur météo d'une chaine locale, se rend avec son équipe à Punxsutawney pour couvrir l'anecdotique événement festif de la bourgade. Mais un curieux phénomène va lui faire revivre la même journée, encore et encore.

Il y a quelque chose de magique dans ce film si évident, l'envie qui est en chacun de nous de refaire tout ce qu'on a loupé, de changer une parole ou un acte malheureux, d'oser essayer un chemin différent pour voir où cela nous aurait mener. L'idée lumineuse aurait pu tourner court avec des tâcherons devant et derrière la caméra. Fort heureusement Harold Ramis et ses acteurs sont d'une autre trempe, et le long apprentissage de Monsieur Murray face à Andie MacDowell saura toucher même les plus endurcis. Le numéro d'équilibriste de Bill, avec son jeu d'acteur désarmant de légèreté, sied parfaitement au propos, et en fait un film de chevet pour de nombreux fans dont je fais partie.

samedi 13 juin 2009

Exodus (NPG) (1995)

Dans notre série "N'oublions pas que Prince sort aussi des albums sous d'autres noms", voici venu le temps de...



Exodus (NPG) (1995)

N.P.G. Operator Intro
Get Wild
Segue
DJ Gets Jumped
New Power Soul
DJ Seduces Sonny
Segue
Count the Days
The Good Life
Cherry, Cherry
Segue
Return of the Bomb Squad
Mashed Potatoe Girl Intro
Segue
Big Fun
New Power Day
Segue
Hallucination Rain
NPG Bum Rush the Ship
The Exodus has Begun
Outro


Wild and Funky
Tandis qu'il règle ses comptes et aborde quelques sujets sérieux dans "The Gold Experience", The Artist sort en catimini un autre album la même année. Beaucoup plus léger et fun, Exodus est le pendant "festif" de la production Princière de 1995. Planqué derrière un pseudo qui annonce la couleur, Tora Tora, Prince laisse son groupe NPG aux manettes et Sonny T. au chant. Ceci n'empêche pas notre obsédé du contrôle de poser son empreinte sur 99% de la composition des titres et d'assurer la plupart des "backing voices". 
L'ambiance de bringue débridée est présente d'un bout à l'autre de la galette, entrecoupés de sketchs comiques mettant en scène les musiciens du NPG et l'Artiste. Le message d'intro explique le projet, entre pure déconnade et manifeste pour la liberté (The Artist est toujours en lutte contre Warner Bros pour récupérer ses droits) : "Get Free / Get Smart / Get Wild". Puis enchaîne sur la locomotive "Get Wild", le single pêchu embarquant l'auditoire dans le Funky train. Le programme de la soirée est on ne peut plus clair : faire la teuf. 
On savoure un instrumental imparable, "New Power Soul", précédé d'une hilarante entrée en matière. Le NPG Gang, soûlé par la musique naze d'un Club local (on reconnait "Dream Factory", titre de Prince, en fond sonore !), malmène le pauvre DJ et prend le contrôle du dancefloor avec un bijou de savoir-faire Jazz-Groove. Tempo irrésistible, démonstration classieuse de la section Saxos/Trompettes, tout paraît tellement simple avec un groupe qui domine. 
Plus tard "The Good Life", autre trip à la cool, voit le groupe fantasmer sur une vie rêvée à la Marcello Mastroianni dans "La Dolce Vita". Le titre tire vers la Pop mais reste dans le ton avec sa mélodie badine qu'on s'imagine écouter au volant d'une décapotable sous le soleil Californien. 
Return of the Bump Squad garde le cap musical, funky à souhait avec son parfum rappelant les productions "The Time", tout en lâchant quelques sentences de prêches un tantinet lourdingues dans le contexte : "Find a job, lose the herb", "Nothin' can save U, unless his name is God", "Add an E to Rap and it spells Rape". Est-ce du second degré ? Va savoir.

L'ambiance se fait plus lourde sur "Big Fun". Le sketch d'intro est cryptique : un des zikos du NPG découvre une lettre d'adieu de sa petite amie, tandis qu'en fond sonore la TV diffuse un dialogue comique de Prince en mode "gangsta". Le morceau convoque par certains cotés "Gett Off" avec toutefois un tempo plus relax, reprenant les subtiles paroles de dragueur patenté made in Roger ("Psychedelic mama, Tell me girl what's your sign? / U and me should get 2gether / It wouldn't be a waste of time"). 
Le slow de l'album, "Cherry Cherry", bascule presque dans la parodie tant il est musicalement dégoulinant de miel. Mais son texte est l'histoire d'une trahison amoureuse qui se termine par le suicide d'une femme après le meurtre de son ex par son mari. Du second degré digne d'une comédie noire, une petite pique à tous ces chants romantiques aux paroles creuses déjà entendus mille fois. Comme quoi il ne faut jamais se fier à l'air et bien écouter le discours.

Le dernier quart d'heure d'Exodus est un sans faute. Le sketch fendard "New Power Day" conte la journée pourrave d'un Prince en voix trafiquée façon Tony Montana, faisant de mauvaises rencontres dans la rue pour finir par se faire jeter par sa girlfriend portoricaine. Il enchaine sur le superbe "Hallucination Rain", version malmenée du classique "Purple Rain" dans une lente montée psyché-délicieuse qui s'explose la foufoune en bouquet final. 
La conclusion de l'album invoque les spectres de George Clinton et du Parliament Funkadelic. "The Exodus has begun" débute par l'attaque d'un vaisseau spatial, avec encore une parodie de Prince, cette fois en Captain obnubilé par sa conquête du monde par l'entremise de son "Endorphin Machine" (titre Rock présent sur "The Gold Experience"). Le groupe NPG aborde le vaisseau et en prend le contrôle, façon B-Movie des années 60. Le titre est un hymne Funky-Jazzy vigoureux dont le refrain résume le thème de l'ensemble, l'âme éternelle du Funk Noir-Américain : "Generation after generation, the soul will never die // We don't cry, we don't die, we just multiply". Les derniers mots sont une dédicace qui en dit long sur l'état d'esprit de l'Artiste : "This shit is dedicated to the memory of His Royal Badness / I know his name, that muthafuckin' Prince, Rest in peace nigga". Prince est mort et enterré, mais rassurez-vous âmes sensibles, il renaîtra quelques années plus tard !

Comme le précédent album des NPG, Gold Nigga, Exodus est une oasis récréative dans une discographie plutôt sérieuse en générale. La dose d'humour prouve que Prince sait se moquer de lui-même, une facette du personnage qu'on a pas l'habitude de constater dans sa production Studio. Les compos vitaminées sauce 90's qui parsèment le LP en font un album Funk poilant qu'on prend plaisir à réécouter.