vendredi 22 avril 2005

Around the world in a day (1985)

Dans notre série "Chroniquons un album de Prince 20 ans après sa sortie", voici venu le temps de...


Around the world in a day (1985)

Around The World in a Day
Paisley Park
Condition of the Heart
Raspberry Beret
Tamborine
America
Pop Life
The Ladder
Temptation


World Music.
Alors qu'une pluie de récompenses inonde "Purple Rain", Prince et ses "Revolution" ont déjà la tête ailleurs. Moins d'un an après la sortie de son hit planétaire l'artiste a confectionné une nouvelle production radicalement différente, au grand dam de sa maison de disques. Le changement de cap s'opère par une sélection d'instruments inédits chez Prince, sitars, violes, sonnettes, tambour et oud arabe, pour explorer un style Pop-Folk façon World Music. Cela s'accompagne d'une évolution du style vestimentaire, façon post-Hippie. La pochette est une peinture naïve montrant divers personnages sur fond de paysage bucolique (qui, en s'y attardant, est un nu de femme). 

L'ouverture de l'album sur le titre éponyme en est le meilleur exemple, donnant une ambiance orientale dans une invitation à un trip rêvé autour du monde, pour atteindre un idéal beatnik ("A government of love and music boundless in its unifying power"). 
Tout cela respire le Peace and Love détendu du slibard (ça nous change !), à l'instar des deux titres Pop phares de "AtWiaD" : l’envoûtant "Paisley Park" et le bijou de légèreté "Raspberry Beret". Baignant dans une atmosphère Baba-Cool, avec des textes célébrant la recherche du bonheur et le plaisir du coup de foudre pour une inconnue, on nage dans la pureté innocente. Elle est loin l'époque du string et des attitudes provocantes, et pourtant on reconnait instantanément la patte Princière. 

Un climat psychédélique consensuel qui n'empêche pas l'auteur d'égratigner ses compatriotes. "America", la seule chanson purement Rock de l'album, malmène l'hymne Américain avec un message clairement politisé ("Aristocrats on a mountain climb / Making money, losing time"). Dans "Pop Life" il combat sur un air piano-pop entêtant la sinistrose ambiante en nous avisant de ses conseils éclairés pour faire fasse à nos problèmes du quotidien et éviter le choix des paradis artificiels ("What U putting in your nose, Is that where all your money goes? / Life it ain't real funky, Unless it's got that pop").

L'émouvant "Condition of the heart" marque une progression significative pour Prince dans l'écriture de ses ballades. Le thème magique au piano est soutenu par une performance vocale étonnante. Sa voix se fait tremblante, laissant transparaître une faille qu'on avait pas l'habitude d'entendre chez le control-freak. L'homme y raconte une nouvelle fois l'abandon amoureux, malgré sa renommée et sa richesse une personne aura toujours d'insolubles problèmes de cœur.
Le dernier titre de l'album, le fébrile "Temptation", est probablement la moins sincère mais la plus spectaculaire déclaration de l'artiste. En mode Luxure sur fond de saxo torride, il commence par faire état de sa condition d'obsédé sexuel. On connaissait déjà l'animal ("Working my body with a hot flash of animal lust", il est chaud-bouillant le Roger !). Mais devant cette overdose de concupiscence, Dieu intervient carrément dans la chanson, sermonnant vertement le malotru qui fini par se repentir et conclu sur un hypocrite "Love is more important than Sex, now I understand". Un beau retournement de veste pour l'homme de "Dirty Mind". Mais c'est surtout la marque d'une prise de conscience d'un garçon de 27 ans qui gagne en maturité.

Avec "AtWiaD", Prince prouve qu'il fait partie des artistes qui créent les modes. Cet album reste un de ceux restituant le mieux son univers, ce mélange improbable de plusieurs genres musicaux portant une identité singulière, celle d'un auteur-compositeur-interprète innovant, en avance sur son temps.