Suspiria 1977 - Suspiria 2018

Les Sorcières de Salon

(2018 - Réalisé par L. Guadagnino) ****

1977, dans Berlin-Ouest, une jeune femme se réfugie chez son psy et lui déclare qu'elle est menacée par les professeures de son école de danse. Elle est persuadée que ce sont des sorcières et a tout consigné dans son journal intime. Pendant ce temps, une nouvelle élève américaine se présente à l'école pour auditionner.

La comparaison de la version 2018 avec le Suspiria de 1977, film de Dario Argento adulé pour son atmosphère envoutante et sa bande-son grandiloquente, est un grand malentendu. Le remake reprend les grandes lignes de son scénario et s'attache à instaurer une ambiance particulière à mille lieues des productions horrifiques standards, comme son illustre prédécesseur. Mais il est également différent en bien des points, se servant intelligemment de l'aura Culte de l'original pour proposer une lecture décalée de ses thématiques. Cela permet aux deux œuvres de coexister, chacune avec ces particularités et son empreinte dans une époque spécifique.

A partir d'un synopsis identique les deux Suspiria sont radicalement opposés en termes d'images, de bande-son et de motivation des personnages. Cela est dû aux 40 ans qui les séparent et à la volonté du réalisateur Luca Guadagnino d'insérer ses propres thèmes sans copier le style inimitable de sa source.

 

La version originale est une débauche de couleurs tranchantes, la nouvelle version marque sa différence par un contraste très fort : éclairage atténué et couleurs discrètes.

 

L'école de danse : façade rouge / bleu délavé

  

 

 

L'intérieur de l'école : couleurs vives / ternes

Salle de danse : même différence de tonalités claire/sombre

 

  

Bureau/Appart de Mme Blanc : ambiance fleurie/feutrée

Nous allons détailler la façon dont les deux œuvres abordent leur sujet et aussi comment l'auteur de la version de 2018 est parvenu à réaliser une chose très rare au cinéma : un remake réussi.

 

Donc oui, on va révéler l'ensemble des deux intrigues à grands coups de SPOILS. Vite, la suite !

Débutons le comparatif en replaçant chaque film dans son contexte.

Dario Argento, Mario Bava et quelques autres sont les maîtres du Giallo, genre cinématographique des années 70 dans lequel on suit une enquête parsemée de meurtres sanglants, mis en images de façon gore. Le Suspiria d'Argento, sorti en 1977, est un couronnement de ce style. L'auteur s'éloigne du côté "policier" pour s'attacher purement au fantastique et au ressenti plutôt qu'à la résolution de l'énigme d'un tueur en série comme c'est généralement le cas dans un Giallo. 

 

Luca Guadagnino est un réalisateur Italien qui a déjà fait un remake (A bigger splash, relecture du film "La Piscine"). Il fait la même démarche avec Suspiria, empruntant le socle narratif pour l'ancrer dans un contexte géo-politique (RDA/RFA, Fraction Armée Rouge). Il approfondit la thématique du fonctionnement d'une communauté, en développant le concept féministe de sororité. Il se paie même le luxe de rendre hommage à la trilogie d'Argento consacrée aux trois Mères, par des références directes aux Mères Tenebrarum, Lachrymarum et Suspiriorum. Son film fait quasiment une heure de plus.

 

 

Présentons tout d'abord les protagonistes de l'histoire.

L'héroïne, Suzy/Susie Bannion.

Madame Blanc, vice-directrice de la troupe de danse.

 

Sara, l'amie de l'héroïne

 

Patricia, la danseuse qui s'est enfuie de l'école.

Une autre danseuse, Olga, a un destin tragique identique à celui
de Patricia dans l'original (tuée par sorcellerie).

 

 

Miss Tanner, une des profs de danse et bras droit de Mme Blanc.

Le Dr Mandel est le psy de Patricia. Son rôle est largement
étendu dans la version 2018, avec le vieux Dr Klemperer.

 

 

Helena Markos, Sorcière en chef !

 

 

On retrouve les mêmes fondations dans les deux versions : une américaine débarquant dans une école de danse en Allemagne, où des meurtres particulièrement sanguinolents ont lieu. L'histoire sert l'ambiance instaurée par Dario Argento pour son film, tandis que Luca Guadagnino utilise l'histoire pour y mêler un contexte historique et politique. On suit d'une part les actions terroristes de la bande à Baader en 1977 dans un Berlin coupé en deux, d'autre part la quête personnelle du Dr Klemperer pour retrouver sa femme disparue depuis la guerre, deux intrigues totalement absentes de l'original.

 

Premier point distinctif majeur entre les deux films, le traitement de la ville est anecdotique dans la version Argento. Il s'agit de Fribourg et elle ne sert qu'au décor du meurtre du pianiste aveugle, Daniel. Tout le reste du film se déroule dans l'école, à part une séquence dans l'appartement de l'amie de Patricia et une autre dehors, avec les Psys Mandel et Milius.

Notons pour l'anecdote que Millius et Daniels deviennent les noms de deux des sorcières dans la nouvelle version, un procédé qui s'applique aussi à tous les rôles non repris comme le neveu Albert ou le domestique Pavlo qui deviennent les noms de deux danseuses, Alberta et Pavla.

Fribourg et ses environs (Suspiria 1977)

Dans le remake la ville de Berlin et son mur sont un décor essentiel, pour montrer la séparation Est/Ouest qui rappelle le lourd héritage de la guerre et pendant les scènes au restaurant où les sorcières communiquent par télépathie. Plusieurs séquences montrent la maison d'enfance de Susie aux USA, pour développer l'emprise religieuse de sa mère et démontrer la maltraitance qu'elle infligea à sa fille.

D'autres scènes ont lieu au poste de police et dans la datcha du Docteur Klemperer, pour suivre l'évolution de sa quête personnelle, la recherche de sa femme Anke dont il est sans nouvelles depuis très longtemps.

 

Berlin Ouest (Suspiria 2018)

La datcha du Dr Klemperer

 

La maison d'enfance de Susie, aux USA

 

Le film d'origine s'ouvre sur l'arrivée de Suzy à l'aéroport en pleine nuit, sous une pluie battante. Un taxi la mène vers l'école de danse. Elle croise une jeune femme (Patricia) qui discute avec une inconnue sur le seuil de la porte, mais l'orage empêche Suzy de saisir la conversation. La jeune femme s'enfuit en courant et Suzy se voit refuser l'entrée. Elle repart en ville et aperçoit Patricia qui court à travers les bois. 

Patricia se réfugie dans l'appartement d'une amie. Elle confie son envie de quitter la ville dès le lendemain. Enfermée dans la chambre, Patricia se sent observée. Une paire d'yeux verts apparaît, puis un bras monstrueux l'attaque à travers la fenêtre. Elle est poignardée au cœur puis est jetée à travers la baie vitrée et se retrouve pendue. Son amie succombe aux blessures infligées par les morceaux de verre.

Cette introduction musclée donne le ton du film. Supporté par la bande son du groupe Goblin, mélangeant rock psyché et synthés ambient, toute l'intrigue est lancée et les postulats posés : le Giallo fantastique est né.

 

 

L'introduction du Suspiria de 2018 est beaucoup plus cérébrale. On découvre que le film est chapitré en Actes. Tandis que des affrontements se déroulent dans la rue, Patricia se rend chez son Psy le Dr Klemperer pour une visite non prévue. Elle lui annonce qu'elle a été envoutée par les sorcières qui dirigent son école de danse et doit s'enfuir pour ne pas être dévorée ! 

Le générique dévoile la maison d'enfance de Susie, l'ambiance démunie du foyer et sa mère malade, puis on voit l'arrivée de Susie dans le métro Berlinois. Sous la pluie, elle se rend à l'école de danse où elle est accueillie pour son audition.

 

Suspiria 2018 marque d'entrée sa différence. Une approche moins spectaculaire mais un style très défini dans un genre diamétralement opposé. La musique de Thom York est également complètement éloignée de celle de Goblin, la chanson titre avec sa mélodie au piano et la voix éthérée du chanteur de Radiohead s'intègre parfaitement au visuel onirique. 

Le scénario tient compte de son statut de remake, on pose l'intrigue dès les premières minutes du film pour ne pas laisser planer un faux suspens. Tout le monde sait de quoi parle Suspiria, les sorcières sont là ! Notez le clin d’œil du nom de la station de métro.

 

(Suspiria 1977)

Le lendemain, Suzy se présente à l'école. Elle est reçue par Miss Tanner et fait la connaissance de la vice-directrice, Madame Blanc. On découvre aussi Daniel, le pianiste aveugle, le jeune Albert, neveu de Blanc, et Pavlo, un domestique Roumain muet. Des inspecteurs de police sont présents pour enquêter sur le meurtre de Patricia.

Suzy fait la connaissance de la troupe de danse, en particulier Olga, une forte personnalité qui lui propose de louer une chambre dans son appartement, et Sara, qui lui explique que tout se monnaye dans cette école. Lorsqu'elle emménage dans l'appart d'Olga, Suzy tente de se rappeler les quelques mots qu'elle a entendu de la conversation de Patricia avec l'inconnue.

Plus tard Suzy se rend à sa première répétition. En chemin elle croise la cuisinière et le jeune Albert dans le couloir. Un étrange malaise la saisie quand les deux personnages la fixent. Durant le cours de danse, Suzy s'évanouit. 

Elle se réveille dans l'ancienne chambre de Patricia, à l'école. Miss Tanner l'oblige à boire, le médecin de l'école la rassure sur son état de santé. Suzy apprend que ses affaires ont été déménagées de chez Olga pour qu'elle intègre définitivement l'école.

L'atmosphère bizarre qui règne dans l'école est restituée de plusieurs manières. L'enquête sur l'assassinat de Patricia, la rivalité entre danseuses et les signes d'un pouvoir occulte oppressant. Même si la troupe de danse comporte quelques hommes, leur rôle est quasiment inexistant au sein de l'école. Quant aux serviteurs y travaillant, ils sont soit muet (Pavlo), soit non voyant (Daniel) !

(Suspiria 2018)

Susie passe son audition à l'école de danse. Trois répétitrices l'accueillent, elles lui demandent de danser sans musique afin d'évaluer son potentiel. Susie s'exécute, sa performance est suffisamment inspirée pour que Madame Blanc, occupée à faire répéter les élèves dans une autre salle, perçoive la force de son interprétation et la rejoigne. 

Plus tard, Miss Tanner explique à Susie le fonctionnement de l'école, qui existe depuis très longtemps sous la forme d'un collectif féministe et effectue des représentations dans le monde entier. Susie a vu un de leur spectacle à New-York, ce qui l'a incitée à rejoindre la prestigieuse école. Tanner lui annonce qu'elle est acceptée, prenant la place libérée après la disparition de Patricia. Pendant ce temps, Blanc l'observe à travers un miroir sans tain.

Le soir, Sara vient chercher Susie dans sa chambre d'hôtel pour emporter ses affaires. Une bombe explose dans une rue adjacente, les attaques terroristes se multiplient dans Berlin.

Le potentiel exceptionnel de Susie est immédiatement mis en avant, dès son audition. Le danger sous-jacent est représenté à la fois par la manifestation de l'intuition surnaturelle de Madame Blanc et par les menaces venant du monde extérieur (attentats). La troupe et la direction de l'école sont exclusivement composées de femmes, renforçant le côté couvent religieux et s'accordant avec le film original.

(Suspiria 2018)

Dans l'Acte 2, intitulé "Palais des larmes", plusieurs séquences absentes du film original vont étoffer le fonctionnement du cercle des sorcières et présenter le personnage essentiel du Dr Klemperer. Le destin tragique de la danseuse Olga est à mettre en parallèle avec la mort de Patricia au début du premier Suspiria, pour annoncer la férocité des sorcières.

On assiste à une réunion du groupe, chacune des professeures vote pour désigner qui va diriger le collectif, entre Madame Blanc et Mère Markos, la directrice que nous n'avons pas encore vu. Markos est reconduite dans sa fonction, l'objectif mystérieux est de réussir un rituel, en "préparant" une des élèves suite au départ de Patricia.

Joseph Klemperer franchit un poste frontière pour se rendre dans sa résidence secondaire en RDA, une modeste datcha en campagne. On découvre qu'il vit seul, le souvenir de sa femme Anke dont il a perdu la trace depuis des années le hante.

 

Susie est officiellement présentée à la troupe. Blanc annonce les changements suite au départ de Patricia qui, dit-elle, a rejoint les terroristes d’extrême-gauche qui sévissent actuellement. Elle demande à Olga de reprendre son rôle. Olga refuse et craque, dénonçant les mensonges de la vice-directrice. Elle décide de quitter immédiatement l'école. 

Susie se propose pour la remplacer, elle a vu et étudié la chorégraphie du ballet Volk de la compagnie Markos. Alors qu'elle se lance dans sa démonstration, Blanc la stoppe et s'approche d'elle. La sorcière prend délicatement les mains de Susie et laisse une subtile empreinte lumineuse, puis fait de même sur ses pieds. 

Au même moment Olga cherche la sortie et croise des profs qui l'observent curieusement. Elle est soudainement prise d'une incontrôlable crise de larmes et se perd dans les couloirs de l'école. Elle est attirée dans une petite salle de danse, où elle se retrouve enfermée, seule. 

 

Susie recommence sa danse, sous les yeux des élèves et des sorcières. Inconsciemment, ses mouvements se répercutent sur le corps d'Olga, qui subit d'invisibles coups très violents. Peu à peu, la chorégraphie s'intensifie et Olga se disloque de plus en plus. Susie, épuisée, s'arrête bientôt. Blanc vient la soutenir tandis que dans l'autre salle, Olga gît sur le sol.

 

 

Aux scènes gores surréalistes du premier Suspiria, le remake répond par une mise à mort spectaculaire, jamais vue au cinéma : un crime par danse macabre. Cette douloureuse expérience marque le point d'orgue de la première partie du film et confirme le statut extrêmement maléfique des sorcières.

L'actrice Tilda Swinton incarne plusieurs rôles : Madame Blanc, Joseph Klemperer (crédité sous un faux nom dans le générique) et Mère Markos. Le psychiatre Klemperer est un personnage en contrepoint de la sorcière Blanc. C'est un lien entre le mysticisme de la sorcellerie et la réalité de l'horreur contemporaine (les conséquences réelles de la guerre). Le choix de les faire jouer par la même personne est sans doute un message sur la dualité des êtres humains.

Notez comment le personnage d'Olga est déjà isolé du groupe dans le cadrage de la salle de danse. Son destin est déjà suggéré.

(Suspiria 1977)

Suzy se trouve dans sa chambre lorsqu'elle constate avec dégoût que des vers tombent du plafond. Tout l'internat est en ébullition, les bêtes se sont infiltré partout ! Miss Tanner découvre la source du problème dans le grenier : les réserves de nourriture sont infestées de larves. 

Madame Blanc s'excuse auprès des élèves et propose d'installer un dortoir temporaire pour la nuit dans la salle de danse principale.

L'événement est assez anecdotique, il intervient juste après l'installation de Suzy dans une chambre de l'école. Faut-il y voir une corrélation ? Son principal mérite est de fournir de nouvelles images chocs et surtout de préparer la séquence suivante, les confidences de Sara à Suzy et la découverte de Mère Markos dans le dortoir improvisé.

 

 

Suspiria (2018)

Seule dans sa chambre, Susie se remémore quelques souvenirs de son enfance, quand elle rêvait de joindre la compagnie de danse en Europe depuis son Amérique natale, interdit par les préceptes strictes de la religion de sa famille (un mouvement Chrétien évangélique nommé le Mennonitisme). 

Pendant ce temps les profs ont collecté des échantillons d'urine des élèves de l'école. On voit aussi en parallèle la découverte par Klemperer du journal intime de Patricia, qu'elle avait laissé lors de sa dernière visite dans son cabinet, et la récupération du corps d'Olga par les sorcières, transporté avec des crochets métalliques. 

Le Dr Klemperer découvre la mythologie des trois Mères dans les notes de Patricia, leurs relations et les rituels obscurs qu'elles pratiquent. On voit d'ailleurs une gestuelle magique d'une des sorcières pour déverrouiller l'accès à l'antre secrète dans les sous-sols de l'école, pour y transporter Olga.

Joseph téléphone à la police pour signaler la disparition de Patricia.

 

 

L'intrigue progresse sur plusieurs plans, on en sait un peu plus sur les origines de Susie et les pratiques du groupe de Mère Markos. On appréhende l'opposition entre croyances, une vision s'apparentant à celles des mormons ou des amish aux États-Unis face à un culte païen Européen.

Le carnet de notes dévoile le concept des trois Mères Tenebrarum, Lachrymarum et Suspiriorum et la quête de Markos pour trouver un nouveau réceptacle pour prolonger sa vie. Le psy n'y voit qu'une preuve supplémentaire du délire paranoïaque de sa patiente et pense qu'elle fait partie d'un groupuscule terroriste.

Suspiria (1977)

Les élèves sont installées à la hâte dans la salle de danse pour passer la nuit. Sara et Suzy en profite pour discuter. Bien que les profs quittent toujours l'école après le dîner, Helena Markos apparaît en personne derrière les rideaux du dortoir pour s'allonger près des élèves. Les deux amies ne peuvent dormir, entendant la respiration sifflante de la vieille femme.

Bien que l'apparition soit démentie le lendemain par Miss Tanner, Sara confirme qu'elle a déjà entendu cette respiration spectrale dans l'école. Il s'agit bien de Mère Markos en personne, venue probablement espionner la nouvelle recrue Suzy à son insu.

Suspiria (2018)

Susie rejoint Blanc dans ses appartements personnels. Cette dernière la félicite pour sa fulgurante ascension au sein de la troupe, en quelques jours la nouvelle recrue est devenue la danseuse principale du ballet. Elle en profite pour en apprendre plus sur les origines de Susie.

Une fois rentrée dans sa chambre, Susie apprend la nouvelle à Sara, très heureuse pour elle. Pendant son sommeil Susie a des visions funestes, en particulier un événement traumatisant de son enfance où sa mère la surprend en train de se masturber dans un placard et lui brûle la main avec un fer à repasser pour la punir. 

 

Le lendemain deux policiers se présentent à l'école, pour leur enquête sur Patricia suite au coup de fil de Klemperer. Pendant ce temps, Sara et Susie cherche discrètement des informations sur la disparue et Olga dans les fiches du bureau des profs, mais plus de trace d'elles ! Susie surprend alors les sorcières en train d'humilier les deux hommes, hypnotisés par un envoutement. Amusée, elle garde pour elle cette scène incongrue.

Plus tard, pendant un cours, Madame Blanc propose aux élèves d'improviser. Susie effectue une danse très lascive, Mère Markos se manifeste sous le plancher pour ressentir son aura.

 

Après la confirmation des dons hors normes de Susie et son implication involontaire dans le mystérieux rituel du cercle, la thématique sexuelle prend le dessus à travers une suite de séquences explicites. La répression par la mère du désir naissant, suivi de la libération explosive et soudaine du plaisir lorsque Susie s'affirme et "se lâche" enfin. 

La vision du policier mis à poil, impuissant sous l'emprise féminine, est sans doute un conditionnement supplémentaire pour la jeune femme. La scène vient aussi en écho au traitement de la gent masculine au sein de l'école dans le film original (Daniel le pianiste aveugle et Pavlo le domestique muet), tous dominés.

Les songes cauchemardesques envoyés par Blanc dans l'esprit de Susie sont probablement la cause principale de sa future révélation en tant que Mère. 

 

 

Suspiria (1977)

Miss Tanner débarque, furieuse, pendant une répétition des élèves. Elle accuse Daniel le pianiste d'avoir laissé son chien sans surveillance, ce dernier a attaqué le petit Albert. Elle lui ordonne de quitter l'école sur le champ, Daniel part sur ses mots énigmatiques : "je ne vois plus, mais j'entends tout ce qu'il se passe ici". 

Le soir, Sara rejoint Suzy et lui explique qu'elle est persuadée que les profs restent dans l'école la nuit. Elle est persuadée qu'il existe une salle cachée, elle pense pouvoir la découvrir car elle a compté leurs pas pendant leurs déplacements. Mais Suzy, visiblement droguée par la nourriture apportée par Pavlo, est trop faible pour la suivre. 

On retrouve Daniel dans un restaurant de la ville. Lorsqu'il rentre chez lui, il sent une présence en traversant une grande place déserte. Cherchant à s'échapper, il est bientôt sauvagement mordu par son propre chien et meurt égorgé.

 

Les sorcières se débarrassent de potentielles menaces qui pourraient révéler leur secret. Cette information est mise en parallèle avec l'objectif confidentiel de Sara. On comprend qu'elle court un grand danger en voulant découvrir la vérité. 

L'usage de drogues pour contrôler les élèves est confirmé par la séquence avec Pavlo et l'état de Suzy.

Suspiria (2018)
Tanner et Blanc discutent de la présence de Markos pendant la répétition. Une rivalité existe entre les deux Mères directrices, l'officielle et l'officieuse qui attend son heure, cachée dans les entrailles de l'école.
Plus tard Susie avoue à Sara, gênée, qu'elle n'avait jamais eu auparavant cette sensation de jouissance ressentie durant son improvisation.
Toutes les danseuses passent la soirée en ville. En passant devant un restaurant elles voient les professeures dîner et s'amuser. Mais cette jovialité n'est qu'une façade pour donner le change en public, en vérité elles communiquent par télépathie et élaborent la suite de leur plan. Pour leur prochain rituel elles ont besoin d'un témoin extérieur. Elles décident de choisir l'homme qui a envoyé la police chez elles, le Dr Klemperer.
Pendant la nuit, Susie reçoit de nouvelles visions ensorcelées de Blanc, une forme lumineuse apparaît et lui fait prendre conscience de sa vraie nature. Elle hurle "je sais qui je suis !" avant d'être réveillée par Sara qui s'est précipité dans sa chambre.

 

Le pourquoi du rituel se précise, Mère Markos cherche parmi toutes les élèves une remplaçante à Patricia, initialement destinée à être l'élue. Blanc prépare mentalement Susie à devenir cette élue. Certaines images, comme le masque cachant la forme lumineuse, sont des symboles expliquant la révélation finale de Susie, au dernier acte du film. Sa véritable nature va bientôt se dévoiler.

Suspiria (1977)
En apprenant la mort de Daniel, Suzy décide d'aller parler à Mme Blanc à propos de Patricia. Elle se souvient de quelques bribes de sa brève rencontre le soir de son arrivée, les mots "iris" et "secret" que Patricia semblait dire à une inconnue présente dans l'école. Blanc répond qu'elle préviendra la police.

A la piscine, Suzy raconte ses confessions à Sara. Cette dernière est mécontente qu'elle ait mis au courant Mme Blanc, craignant que cela ne déclenche la recherche de cette inconnue par les profs. Et comme Sara était proche de Patricia, cela la désigne directement. Sara avoue qu'elle détient les notes de Patricia à propos des activités suspectes dans l'école.

 

Ici le genre Giallo reprend ses droits. L'enquête menée par Sara et Suzy oblige à plusieurs scènes d'exposition pour faire progresser la résolution de l'intrigue. Ironiquement, le réalisateur met Suzy juste devant le secret qu'elle recherche lorsqu'elle parle d'iris dans le bureau de la directrice ! 

 

Suspiria (2018)
Joseph Klemperer se rend au poste de police pour connaître l'avancée de l'enquête sur Patricia. Les flics, manipulés par les sorcières, n'ont rien vu. Le psy remercie l'un des commissaires qui rechercha un temps sa femme Anke. 

Les répétitions pour le ballet Volk continuent à l'école. Susie conteste certains choix de chorégraphie de Blanc, elle ne parvient pas à effectuer les sauts et pense qu'il faudrait plutôt rester au contact du sol. A la demande de Mme Blanc, une des danseuses fait une démonstration de sauts. Elle est rapidement victime d'un syncope. 

Joseph prend contact avec Sara à la sortie de l'école. Il veut en savoir plus sur ce qui se passe et l'invite à déjeuner. Là, Klemperer lui montre le journal de Patricia et ses théories sur la présence de pièces secrètes dans l'établissement. Sara assure que l'école n'est qu'une simple compagnie de danse et prend congé.

Blanc amène Susie dans la petite salle des miroirs où fut exécutée Olga. Elle lui transmet son savoir et l'assure de son soutien. Susie parvient à présent à effectuer le saut comme le voulait la sorcière.

 

Susie prend de l'assurance et manifeste sa puissance surnaturelle en éliminant une des protégées de Mme Blanc, amorçant un bouleversement dans l'équilibre des forces qui s'affrontent. Notez la décomposition des silhouettes par les miroirs, procédé classique pour montrer la réalité complexe des personnalités multiples d'un être. Blanc accepte de transmettre ses connaissances. Les rôles s'inversent, l'élève arrive au niveau de la maîtresse.

L'enquête sur l'école tourne court, grâce au contrôle invisible des sorcières. Klemperer décide donc de contacter directement l'amie de Patricia pour en savoir plus. Sara, qui ne se doute de rien pour le moment, l'éconduit poliment.

 

 

Suspiria (1977)
Une nuit, Sara tente de réveiller Suzy en catastrophe. Elle est paniquée car ses notes ont été volées. Mais Suzy, à nouveau trop faible, ne peut l'aider. Se sentant poursuivie par une menace invisible, Sara apeurée court dans les couloirs de l'école. Elle tente de s'échapper par une trappe au plafond mais est attaquée par un être inconnu muni d'une lame de rasoir. Sara passe par une petite ouverture et se retrouve dans une pièce emplie de fils barbelés dans lesquels elle tombe, se blessant gravement. Elle est saisi par une main gantée.

Les jeux de lumières et les formes colorées indiquent clairement une présence impalpable, celle des sorcières et probablement de Markos elle-même. La seule alliée de Suzy disparaît. elle sera désormais seule pour se confronter à la menace.

Suspiria (2018)

Les enseignantes discutent de l'ultimatum concernant le rituel du transfert de Mère Markos. La chef se meurt, son immortalité ne peut se prolonger que si elle investit un nouveau corps. Tout à coup, ne supportant plus ce qui se trame avec sa complicité silencieuse, Miss Griffith saisi un couteau et se tranche la gorge.

A la nuit tombée, intriguée par les révélations du Dr Klemperer, Sara part à la recherche de salles secrètes. Elle compte les pas qui résonnent dans l'édifice pour essayer de trouver où se rendent les profs. Elle fini par découvrir l'entrée secrète et parvient à ouvrir la porte dérobée. Elle découvre un vestibule avec des étagères remplies d'objets incongrus, notamment un tableau gothique montrant Blanc et Markos. Sara vole un crochet en métal puis, effrayée par un chant rituel d'une pièce voisine, retourne précipitamment dans sa chambre.

Convaincue à présent que des événements malsains se déroulent dans l'école, Sara retrouve le Dr Klemperer en lui amenant sa trouvaille, le crochet métallique. Elle pense que Patricia est peut-être retenue prisonnière. Le psy garde l'objet, pour protéger Sara.

En sortant, Sara croit voir Miss Tanner qui l'observe dehors, c'est une illusion.

 

 

Le personnage effacé de Miss Griffith a déjà été montré plusieurs fois, se cachant lors de l'arrivée de Susie et pleurant lors du meurtre d'Olga. Cela montre que les jeux de pouvoirs incessants dans le groupe laissent les plus sensibles dans la détresse.

Sara commence à découvrir la vérité mais il est déjà trop tard pour elle : les sorcières savent tout et lui prouve qu'elle est étroitement surveillée.

Suspiria (1977)

Suzy comprend qu'on lui ment lorsque Tanner dit que Sara a pris ses affaires et quitté l'école tôt le matin. Elle téléphone au Dr Mandel, l'ancien psy de Sara. Le docteur lui révèle que Sara avait élaboré une théorie selon laquelle l'école abritait un couvent de sorcières, avec à sa tête Helena Markos, une émigrée Grecque persécutée. Elle fonda un école de sciences occultes et mourut dans l'incendie qui ravagea le bâtiment. L'endroit devint une école de danse par la suite, dirigée par une ancienne élève de Markos. 

Un collègue de Mandel, le professeur Milius, explique à Suzy le fonctionnement d'un cercle de sorcières. Il tire sa force de sa Reine, personnage central sans qui le groupe est sans pouvoir. Les sorcières accumulent des richesses par l'utilisation de leur magie maléfique.

L'explication logique de l'intrigue est expédiée en 5 minutes ;-) L'enquête "policière" n'est pas l'intérêt principal de Dario Argento dans Suspiria, on le sait. L'exposition sur l'origine du mal est un passage obligé dont le réalisateur se débarrasse avant d'orchestrer son grand final. On notera quand même le sous-entendu misogyne : les sorcières ne sont qu'un groupe de femmes vénales, prêtes à tout pour assouvir leur besoin d'argent et de pouvoir !

Suspiria (2018)

Un autre souvenir de la mère de Susie la montre alitée, malade, parlant de sa fille. C'est elle mon pêché, souffle-t-elle. Sara sent que Susie a changé, elle lui reproche de se rapprocher de Madame Blanc. Bientôt, la représentation officielle du ballet Volk se prépare. Les spectateurs sont accueillis dans la grande salle de l'école, dont le Dr Klemperer.

Pendant que les danseuses s'échauffent en coulisse, Sara retourne dans l'antre. Elle découvre une grande chambre parcourue de fils tressés comme des toiles d'araignées. Patricia est prisonnière, prostrée. La jeune femme ressemble à un zombie, elle n'a plus de volonté. Un autre personnage, atrocement mutilé, s'approche en rampant (probablement Olga, maintenue en vie par sorcellerie). Markos, allongée sur son lit, est immobile et cache son regard derrière des lunettes noires. Sara s'enfuit, épouvantée.

 

La mère et Sara donnent des indices sur ce que prépare Susie lors du rituel qui s'annonce. 

Les formes géométriques de la salle de danse trouvent un écho dans l'enchevêtrement de cordes de la chambre de Markos, figures qu'on a déjà remarqué dans le carnet de notes de Patricia. Tout cela est nécessaire à l'accomplissement du rituel magique. On retrouve aussi ses motifs dans les costumes des danseuses, faits de cordes rouges. La symbolique est forte : toutes les élèves sont entravées physiquement et conditionnées psychologiquement par ses chaînes métaphoriques.

Suspiria (1977)

De retour à l'école, Suzy apprend que tout le monde est parti au théâtre. Par méfiance elle décide de jeter la nourriture dans l'évier. Soudain une chauve-souris traverse la fenêtre et l'attaque. Elle parvient finalement à l'écraser au sol. 

En fouillant dans ses affaires elle retrouve une note manuscrite de Sara, indiquant un décompte. Elle en déduit qu'il s'agit du nombre de pas à effectuer de portes en portes. Suzy réussi à franchir le couloir gardé par les domestiques, le décompte la mène dans le bureau de Madame Blanc, où la moquette absorbe les bruits de pas.

En examinant les murs, elle comprend que les iris peints cachent le mécanisme qui ouvre une porte dérobée. Elle suit le couloir menant à la salle secrète où les sorcières sont réunies autour de Blanc. La chef se plaint que l'élimination de Suzy ait raté.

Suzy n'est plus droguée (notez comme le liquide ressemble à du sang) et échappe à la tentative d'attaque des sorcières. Une scène un peu ridicule avec une petite bestiole agitée devant l'actrice, le pouvoir des sorcières est du coup beaucoup moins impressionnant ;-). 

Elle résout l'énigme de la porte secrète sous les iris (chapeau bas !) et surprend le cercle en pleine activité. Blanc annonce qu'elle veut se débarrasser de "l'Américaine" et boit la même boisson que celles données aux élèves. Est-ce un indice, un moyen d'indiquer qu'elle absorbe leur force vitale ?

 

 

Suspiria (2018)
Sara s'enfuit et Madame Blanc déclenche par la pensée des pièges pour la retenir. La jeune danseuse tombe dans une trappe qui s'ouvre au sol et se fracture le tibia. 

Au même moment, la troupe débute le ballet, mené par Susie. Plusieurs sorcières viennent secourir Sara et soigne sa blessure par magie. La chorégraphie s'intensifie. Bientôt, Sara est accompagnée dans la salle, elle rejoint la troupe pour danser, sous les yeux stupéfaits de Klemperer. Elle est sous l'emprise d'une force qui la dépasse, son regard est absent. 

Les mouvements se font de plus en plus violents et syncopés, Sara fini par s'écrouler lorsque sa blessure se rouvre. Elle semble appeler à l'aide Joseph Klemperer. Les spectateurs sont choqués, la représentation s’interrompt. Les regards croisés de Susie et Blanc montrent qu'une lutte de pouvoir invisible vient d'avoir lieu entre les deux femmes.

 

On l'apprendra plus tard, c'est Susie qui s'oppose à Blanc pendant le ballet pour sauver Sara. Mais l'envoutée ne supporte pas le rythme imposé et succombe. Le ballet est clairement un préambule au rituel que nous allons découvrir lors de la confrontation finale, avec chez les danseuses des poses de soumissions (genou à terre, tête baissée) et une gestuelle ésotérique rappelant les formes géométriques vues au sol, dans le carnet de Patricia et chez Markos.

Suspiria (1977)
Suzy, voulant échapper à Pavlo qui patrouille dans les couloirs, tombe sur le cadavre de Sara. La victime est horriblement défigurée, avec des épingles dans les yeux, et crucifiée. Pour se cacher, Suzy pénètre dans une chambre richement décorée. Une forme est allongée dans le lit.

Le destin de Sara est résolu, trouvant une horrible fin dramatique, et la confrontation finale avec Markos se prépare.

 

Suspiria (2018)
Madame Blanc rejoint Susie dans sa chambre. Elle est consciente que c'est la jeune femme qui a ramené Sara, une manifestation de ses nouveaux pouvoirs. Mais la tentative a échouée, les deux sorcières trouvent un statu quo et s'allient. Plus tard, lors d'un ultime dîner au restaurant avant l'accomplissement du rituel, Blanc et Susie sont prêtes tandis que les autres sorcières s’accoquinent avec les danseuses. 

 

On voit Joseph Klemperer se débarrasser des affaires de Patricia et du crochet trouvé par Sara. A son retour dans sa datcha, sa femme Anke l'attend ! Chamboulé, l'homme rentre avec elle à Berlin. Mais en passant devant l'école, Anke disparaît subitement et deux sorcières capturent le vieil homme. C'était une illusion pour l'attirer et assister au rituel.

La séduction des "anciennes" impliquent que les jeunes danseuses vont probablement rejoindre le cercle et perpétuer l'existence du groupe, avec Markos réincarnée dans le corps de Susie. Mais Blanc ressent le potentiel exceptionnel de sa protégée, elle se demande sans doute pourquoi Susie est aussi calme alors qu'elle sait sans doute ce qui l'attend. 

L'actrice incarnant Anke est tout simplement l'héroïne du premier Suspiria, Jessica Harper. Le lien avec le premier film est d'autant plus troublant qu'elle incarne ce que l'un des personnages principaux cherche en vain depuis le début. Et elle se volatilise aussi soudainement qu'elle est apparue, ironie du réalisateur du remake qui confirme que son projet n'est pas d'imiter platement l'original.

Le traquenard pour enlever Klemperer fait partie du plan pour que le rituel fonctionne (un témoin extérieur est nécessaire, autant prendre celui qui est lié à Patricia et Sara).

Suspiria (1977)

Suzy s'approche du lit, mais Markos est invisible. La Mère utilise ses pouvoirs dans un déluge d'explosions et fait surgir le cadavre de Sara pour assassiner Suzy. L'héroïne distingue l'aura de Markos et plutôt que d'essayer de tuer Sara, déjà morte !, elle se saisit d'une broche et la plante dans le cou du fantôme de Markos. La vieille sorcière se matérialise et meurt, déclenchant la destruction de l'école.

Suzy parvient à s'enfuir, tandis qu'un incendie ravage le bâtiment et que Blanc et les autres succombent. 

Suzy s'éloigne sous la pluie, un étrange sourire sur les lèvres...

Le dernier coup de théâtre est le jaillissement imprévu de Sara, qu'on croyait morte. Grâce à son intuition et son courage, Suzy triomphe du mal. La dernière image symbolise sa joie d'avoir survécu. Certaines interprétations penchent plutôt sur le fait que l'héroïne jubile d'être maintenant détentrice du pouvoir des sorcières. 

Suspira (2018)

Susie se prépare pour le rituel. Elle suit la forme lumineuse et arrive dans l'antre, découvrant toute la troupe en transe qui exécute entièrement nue un ballet maléfique. Markos est présente, le corps en décomposition, avec Tanner et Blanc à ses côtés. Klemperer est à ses pieds, déshabillé également. Sara et Patricia se trouvent au centre du ballet, immobiles. elles sont dépecées mais toujours vivantes !

Madame Blanc dit à Susie qu'il est encore temps de tout arrêter, qu'elle peut faire disparaître de sa mémoire tous ses événements. Markos lui tranche violemment la base du cou par un sortilège, pendant que le rituel se fait plus sauvage encore.

Susie est parfaitement calme, des visions de sa mère se mêlent à une nouvelle apparition sortant des entrailles : la mort. Markos comprend trop tard que Susie s'est révélée à sa vraie nature : elle est Mère Suspiriorum et va prendre sa place ! La mort incarnée achève Markos puis se dirige vers toutes les sorcières ayant voté pour elle lors de la réunion du groupe (au début du film) et les supprime brutalement. Mère Suspiriorum demande aux captives ce qu'elle souhaitent, Sara et Patricia réclament de mourir. La sorcière exhausse leur souhait. Le ballet des danseuses tourne autour de la nouvelle élue, triomphante.

Plus tard, Klemperer est raccompagné par les sorcières survivantes, celles qui avaient voté pour Blanc. Cette dernière semble avoir survécu à sa terrible blessure.

 

Durant l’épilogue, le Dr Klemperer, encore choqué, reçoit la visite de Susie/Suspiriorum. La sorcière suprême lui décrit le véritable destin d'Anke. Elle est morte de froid dans un camp de concentration pendant la guerre. Joseph pleure de douleur, Suspiriorum lui fait tout oublier et il subit une attaque cardiaque.

On voit la datcha, de nos jours, habitée par une famille. L'inscription A+J est toujours là...

 

Madame Blanc comprend rapidement que quelque chose cloche pendant le rituel. Celle qu'elle pensait être son égale, qui devait accueillir l'esprit de Markos, fausse incarnation, est en fait une des trois Mères principales décrites dans la mythologie des sorcières. Elle vient prendre sa place naturelle au sein du cercle en éliminant celles qui se sont opposé en choisissant Markos au lieu de se ranger du côté de son alliée, Blanc.

L'apparition de la mort est mise en parallèle avec la mère de Susie, personnage haï qui symboliquement doit périr pour laisser sa fille devenir Mère à son tour (on note que la Mort et la mère de Susie sont jouées par la même actrice).

Le dénouement montre que la fonction de Mère Suspiriorum dans la mythologie de la trilogie de Dario Argento est scrupuleusement respecté : chacune des trois mères est une incarnation de la Mort (Ténèbres, Soupirs et Larmes). Susie donne la mort à celles et ceux qui le souhaitent.

Le destin de Klemperer permet de lier l'histoire des sorcières à l'Histoire de notre monde. Klemperer est le témoin de deux tragédies : la disparition réelle de sa femme et la disparition fictive de Patricia. Que ce soit les sorcières de 1977 ou les nazis des années 30, les deux groupes suivent aveuglément leur leader. Cela se perpétue encore et encore, avec dans le film la récurrence des allusions à la Fraction Armée Rouge en Allemagne dans les 70's et dans une moindre mesure au personnage de la mère de Susie, qui suit aveuglément des préceptes religieux. 

Deux camps s'affrontent, le mur de Berlin qui passe devant l'école de danse en est la symbolique, ceux qui ne sont pas du "bon" côté doivent mourir, comme les sorcières ayant suivi Markos, comme le groupe terroriste d'extrême-gauche fait des victimes lors d'attentats à la bombe, et comme la mère de Susie qui meurt en disant que sa fille fût son seul péché.

C'est ici qu'intervient l'histoire de Susie. L’avènement de Mère Suspiriorum met fin au conflit dans le cercle des sorcières et aussi au conflit psychologique de Joseph Klemperer. Il met aussi fin au conflit secret que gardait Susie, elle comprend et assume son destin.