(Star Wars IX: The Rise of Skywalker - 2019 - Réalisé par J.J. Abrams) ***
Sith Rey, une des nombreuses fausses pistes du film |
Il y a pas très longtemps,
dans une galaxie proche, très très proche...
Après avoir saccagé ce qui restait de dignité à la saga,
la fin du calvaire semble imminente et tout l'univers s'en réjouit.
Dans un soubresaut de lucidité, Mickey le Sith ressuscite Jar Jar Abrams.
Car personne jamais vraiment ne meurt, comme disent les clones de l'Empereur.
Si vous avez manqué le début...
L'ami J.J. avait plutôt habilement résumé toute la trilogie Classique en un seul épisode (VII : Le Réveil de la Nostalgie), photocopie confortablement rassurante. L'Empire Disney et Kathleen Kennedy la productrice prirent ensuite le risque de confier l'écriture et la réalisation de sa suite à l'auteur de Looper, avec pour mission de bouleverser les attentes du public. On peut dire que le pari fut réussi, mais pas dans le sens attendu (VIII : Les Derniers Outrages).
Se retrouvant avec le lourd fardeau de non seulement conclure la troisième trilogie Star Wars mais surtout de clore l'intégralité de la saga "Skywalker" commencée il y a plus de quarante années, les quatre scénaristes crédités de "L'Ascension" avaient deux choix. Soit ils prolongeaient la déconstruction brutale amorcée par l'épisode précédent "Les derniers Jedi", soit ils revenaient à la structure déjà-vue du "Réveil de la Force". Dans les deux cas, ils allaient dans le mur.
Car continuer à piétiner les fondamentaux du culte Starwarien aurait été un cadeau d'adieu bien médiocre pour les fanatiques. Mais, à l'inverse, terminer sur l'attendu duel Rey-Kylo n'aurait été qu'une redite du N°8. Impasse.
Dans notre précédent billet, nous étions nous-même dubitatif (pour rester poli). Comment les auteurs allaient-ils recoller les morceaux du puzzle et proposer une conclusion crédible ?
Ils ont opté pour la méthode la moins subtile en fonçant tels de gros morses sur un banc de mollusques. Dès l'intro et son générique déroulant, l'incroyable coup de théâtre est affiché : l'Empereur is back. Oui, celui-là même qui avait été désintégré il y a 35 ans dans l'épisode VI et auquel aucun des films suivants n'a fait la moindre allusion. Pour être plus précis, le mega-spoil avait déjà été balancé dans le teaser, où le rire de Papy Palpatine résonnait.
Il aurait fallu un film entier, façon spin-off, pour expliquer comment l'Empereur a survécu à l'insu des autres Siths et pourquoi il n'a pas utilisé ses incommensurables pouvoirs pour autre chose que la création de clones inefficaces pendant toutes ses années ?
A partir de cet instant on sait que le grand thème final de la saga tient sur cette ligne de dialogue entendue dans la pré bande-annonce : No one's ever really gone (personne n'est jamais vraiment disparu).
L'empereur dissout dans un réacteur énergétique ? même pas mal ! Rien n'est éphémère, tout est sans conséquence, les actions et les convictions des protagonistes sont sans valeur.
Alors que "Les Derniers Jedi" mettait l'accent sur l'échec de tous ses héros et héroïnes, "L'ascension de Skywalker" s'emploie à démontrer que tout cela n'est pas grave car rien n'a d'importance.
Le casque que Kylo Ren avait pulvérisé de rage est réparé, une manière pour le réalisateur J. J. Abrams de désavouer les choix de son prédécesseur. De façon similaire, le geste sacrilège de Luke jetant son sabre laser avec désinvolture est corrigé dans le nouveau film lorsque son fantôme empêche Rey de faire la même chose. C'est aussi l'apparition de Luke qui va convaincre Rey de reprendre confiance pour aller accomplir l'affrontement final contre Palpatine, lui qui tenait un discours autrement plus fataliste dans "Les Derniers Jedi".
L'impact de la mort de Chewbacca est rapidement désamorcé. En dix minutes nous perdons un des piliers de Star Wars dans un accident provoqué par l'héroïne principale puis nous retrouvons notre fidèle boule de poils géante bien vivante, Chewie avait tout simplement été embarqué sur un autre vaisseau ! Un bien cruel yoyo émotionnel pour Rey, qui n'est qu'une occasion de plus pour J.J. de scruter plein cadre le visage hautement cinégénique de l'actrice Daisy Ridley, qui reste le meilleur choix de casting de cette ultime trilogie tant son jeu en surtension permanente crédibilise son personnage.
Autre acte sans conséquence, le sacrifice de C3PO acceptant d'effacer sa mémoire. Cette bravoure soudaine pour un couard notoire et capitale pour l'intrigue est annihilée lors de la conclusion : son pote R2 avait une sauvegarde ! Du coup, son speech où il "regarde une dernière fois ses amis" avant de subir sa remise à zéro est beaucoup moins poignant. Notre sympathique androïde récupère ses souvenirs, personne n'est jamais vraiment parti...
Comme Han Solo, qui revient d'entre les morts pour délivrer son fils Ben, alias Kylo, de son tourment. C'est au terme de son duel contre Rey que Kylo est proche de renoncer au côté obscur. Il a pourtant le dessus mais sa mère Leia intervient par le pouvoir de la Force et le fait douter. Rey profite de cette hésitation pour toucher mortellement Kylo. Sentant qu'elle vient non seulement de tuer sa "dyade", l'entité unique de deux éléments distincts qu'elle forme avec ce double maléfique, mais que Leia succombe également à ce coup fatal, Rey décide de soigner Kylo avant de partir en exile, tournant le dos à son destin.
Han apparaît alors à son fils, bien que n'ayant jamais maitrisé la Force. Oui, même les gens "ordinaires" ne sont pas vraiment morts ! Il le convainc de rejeter les préceptes Sith, Ben balance son sabre laser. Cette séquence fait de Han celui qui a libéré son fiston du mal, faisant passer au second plan le sacrifice crucial de sa mère Leia.
Le film compacte une suite de péripéties sans tenir compte des événements précédents, comme si les auteurs voulaient à tout prix faire table rase des "Derniers Jedi". La romance entre Finn et Rose ? oubliée ! La dévotion du Général Hux au Premier Ordre ? il trahit son camp dès que l'occasion de se débarrasser de Kylo se présente. La puissance suggérée des Chevaliers de Ren ? les pauvres sont pliés en une minute chrono par Ben Solo. Au fait, qui était le Suprême Leader Snoke ? un simple petit clone !
Certaines ficelles de l'intrigue s'apparentent à des raccourcis scénaristiques trop faciles, masqués par le rythme emballé. Par exemple lorsque le groupe est poursuivi par les Stormtroopers sur la planète Pasaana, dans leur fuite les héros tombent dans des sables mouvants et se retrouvent miraculeusement pile à l'endroit où est l'objet convoité : la Dague Sith.
On ne commentera pas davantage l'assaut final à dos de chevaux sur un Croiseur en plein vide intersidéral, séquence que j'ai intégralement contemplé, bouche béé et en apnée, sans pouvoir déterminer si les auteurs se foutaient ouvertement de nous ou pensaient tenir là une conclusion incroyablement cool à la saga.
On ne commentera pas davantage l'assaut final à dos de chevaux sur un Croiseur en plein vide intersidéral, séquence que j'ai intégralement contemplé, bouche béé et en apnée, sans pouvoir déterminer si les auteurs se foutaient ouvertement de nous ou pensaient tenir là une conclusion incroyablement cool à la saga.
De nouveaux personnages sont introduits et presque immédiatement évacués, alourdissant un casting déjà très fourni. Qui se souviendra de Zorii Bliss, Jannah ou Wexley ? Juste des troisièmes couteaux destinés à placer une petite péripétie pour allonger la durée du film, à l'instar d'un épisode de série TV lambda qui doit remplir son quota de rebondissements mineurs sans rapport avec l'arc principal.
Le pire concerne le point central de la trilogie : les origines de Rey. Elle ne cesse de chercher à savoir qui sont ses parents. Elle va découvrir qu'elle est la petite fille de Palpatine ! Ce dernier a eu un fils (avec qui ? l'enfant est-il un clone ? aucun Jedi ou Sith n'est au courant ? on ne saura jamais). Le fiston a désavoué son père maléfique, ce qui semble improbable vu les incroyables pouvoirs du papa'lpatine. Le fils trouva l'âme sœur et de leur union naquit Rey, que ses parents s'empressèrent de cacher sur la planète Jakku sachant que le grand-père la chercherait sûrement.
Cela ne vous rappelle rien ? Évidemment Leia et Luke, qui furent dissimulés aux yeux de Dark Vador de la même façon. Et le destin de Rey Palpatine est identique, elle affronte son ascendance comme jadis Luke Skywalker affronta son père. On va même jusqu'à plagier fidèlement les événements de l'épisode VI, lorsque l'Empereur dévoile à Rey ses Croiseurs écrasant la Résistance dans l'espace, comme il le fit en montrant à Luke sa flotte de vaisseaux en train d'écraser la Rébellion.
Le résultat du combat est similaire : l'Empereur Palpatine est vaporisé par la dyade Rey/Ben.
Mais comme vous le savez, personne n'est jamais vraiment disparu...