How can I save my little boy... |
(2023 - Réalisé par C. Nolan) ****
L'histoire du directeur du Projet Manhattan, Robert Oppenheimer, en charge de créer la bombe atomique avec son équipe. Dans cette course à l'armement en pleine seconde guerre mondiale, on suit les implications philosophiques et les intrigues politiques qui vont poursuivre le scientifique dans les années suivant les bombardements d'Hiroshima et de Nagasaki.
Tirée du livre "American Prometheus", cette biographie se focalise évidemment sur l'événement central de la vie du célèbre physicien, la création de la première arme de destruction massive. Mais c'est aussi l'occasion pour le réalisateur d'en traiter les conséquences. Comme on s'y attend avec le Sir Nolan, ce n'est pas un biopic Hollywoodien classique auquel on a droit. En mélangeant les époques, le réalisateur parvient à gérer intelligemment la pléthore d'événements, d'obscurs protagonistes et de figures historiques qui ont jalonné la vie d'Oppenheimer. On se focalise sur trois périodes, son ascension dans les années 30, son travail sur la bombe parasité par ses sympathies Communistes supposées et son audition en 54 pour maintenir son habilitation de sécurité nationale.
On aborde ainsi toutes les facettes de cet homme, génie scientifique fuyant le nazisme, mari cédant à l'adultère, diplomate devant s'accommoder avec les fortes personnalités qu'il dirige et les embrouilles de ses supérieurs militaires et politiques. Plutôt que de tenter une explication technique et de s'appesantir sur des tableaux rempli de formules mathématiques imbitables, Nolan fait passer la complexité scientifique de l'élaboration de la bombe à travers de courtes et spectaculaires séquences presque abstraites, comme si nous étions au cœur des atomes et de la pensée.
Le grand débat sur le film concerne bien sûr la destruction des villes Japonaises en Août 1945 : fallait-il montrer l'horreur ? Comment fictionnaliser ce Mal absolu qui, selon certains, aura finalement épargné plus de vies qu'il n'aura fait de victimes ? Les auteurs ont préféré s'abstenir, mais la séquence du "test" est suffisamment explicite pour en démontrer les ravages et les "visions" du personnage principal font passer le message de manière plus subtile. De plus, Oppenheimer n'est pas un film sur la guerre. Une large partie est d'ailleurs consacrée aux tribulations juridiques de notre homme, pris entre ses auditions aux allures de procès hypocrite et son besoin égocentrique de reconnaissance publique. Pas simple à mettre en scène, il fallait un cinéaste et des auteurs à la hauteur de leur sujet. Contrat rempli !